Se faire accompagner pour sortir de l’alcoolisme

L’association « ALLO STOPALCOOL », est un véritable soutien pour les malades et leurs familles. Michel et Greg qui animent ce groupe nous aident à comprendre.

Bonjour, pouvez-vous nous présenter l’association ?

Nous sommes une association indépendante depuis 2008, auparavant rattachés aux amis de la santé. Nous animons des réunions tous les lundi soir à Copponex 18h à 21h. Des malades alcooliques nous contactent et nous leurs proposons un suivi bénévole à la fois lors de séance en groupe mais aussi de manière individuelle. Nous avons la chance d’être subventionné et soutenu par le département et les communes. Les malades peuvent mettre des années avant de nous contacter, c’est un pas dur à franchir. Il y a souvent du déni et le malade pense pouvoir tout gérer, jusqu’à ce que la situation devienne invivable pour lui ou son entourage.

Quel type de profil rencontrez-vous ?

Tous les types de profils socio-professionnels sont touchés par la maladie. Il est estimé que 10% de la population est dépendante à l’alcool. C’est une vraie maladie avec une dépendance biologique. Souvent les personnes deviennent dépendantes suite à des traumatismes ou des mauvais traitements ayant eu lieu dans l’enfance. Les femmes représentent la moitié des malades mais elles sont moins visibles. Elles sont aussi plus touchées par les dégâts physiques que provoque l’alcool et leur espérance de vie n’en est que plus réduite. La dépendance à l’alcool ne se mesure pas qu’à la quantité consommée mais sur le besoin irrépressible qu’il génère. C’est une sorte d’antidépresseur, mais les dommages sur la santé sont énormes : cancer de la gorge, des poumons, du foie, déshydratation, cela touche tout le corps. L’alcoolique devient obsessionnel car il ne peut plus se passer biologiquement de l’alcool, sa vie et ses journées s’organisent pour pouvoir consommer de grandes quantités. C’est un esclavage, l’alcoolisme détruit tout : le couple, la famille, le travail, l’argent.

En quoi l’accompagnement par d’anciens alcooliques est bénéfique ?
Principalement grâce au non jugement. C’est important de savoir juste écouter, que les personnes puissent se sentir comprises et accueillies avec bienveillance. Un ancien alcoolique sait que c’est le corps qui réclame et que ce n’est pas juste une histoire de volonté. Ils se rendent compte que nous sommes passées par là et que nous avons pu en sortir. Ils ne nous mentent pas car ils savent que l’on sait. Il n’y a pas d’obligation chez nous, il faut que ce soit la volonté du malade de se soigner car sinon cela ne peut pas fonctionner.

Il faut se responsabiliser et apprendre à se connaitre, savoir pourquoi on va mal. La dépendance vient toujours d’un mal-être, nous sommes là pour les aider à comprendre ce qui les a amenés à cette situation, trouver la source du problème. Le jour où l’on rentre à l’asso on a déjà entamé une démarche de soin, c’est un grand pas. Nous avons reçu une formation de 5 jours, mais notre vraie formation c’est le vécu.

Nous faisons en sorte que le malade se sente accueilli et que nous puissions créer un lien de confiance avec lui. On le laisse parler et on analyse ses mots, c’est un travail préalable pour le diriger vers une cure. C’est la seule façon de couper avec son mode de vie et se reconnecter à soi-même. C’est pour cela que le mieux c’est un centre de cure loin de chez soi. L’alcoolique prête attention aux autres avant tout et Il doit apprendre à prendre soin de lui. La cure dure 5 semaines et il y a une aide médicamenteuse, des soins, un accompagnement psy.  Il ne faut pas se sevrer seul, c’est dangereux.

Notre rôle est d’augmenter leurs chances de réussite mais le malade doit s’en sortir lui-même. Avec une cure seule, il y a moins de 10% de chance de ne pas récidiver mais avec notre association, c’est 40% à 70%. C’est une grande source de joie pour nous. Notre engagement est prenant et parfois il faut être disponible à toute heure. Mais c’est satisfaisant de pouvoir aider et de mesurer le chemin que l’on a parcouru. C’est une piqure de rappel de voir ce à quoi on a échappé. La maladie peut permettre de grandir.

Vous intervenez après des jeunes, comment cela se passe ?

A la MF de Cruseilles nous intervenons dans chaque classe chaque année, et aussi dans d’autres collèges. On le fait avec notre vécu, on ne va pas sur l’interdit, on ne fait pas de leçon de morale. Les jeunes doivent pouvoir parler de leurs problèmes pour ne pas devenir dépendants. Idéalement, il faut reporter la première consommation d’alcool le plus tard possible. Le cerveau se construit jusqu’à 22 ans et l’alcool est délétère sur les jeunes. Malheureusement ils consomment de l’alcool de plus en plus tôt, l’âge de la première « cuite » est passé de 15 à 11 ans. Les séances sont plutôt interactives, ils nous parlent et se confient franchement. Certains jeunes viennent nous parler à la fin, pour se confier leur détresse. C’est très touchant pour nous de sentir leur confiance mais c’est aussi déstabilisant de voir ce que certains subissent dans le silence. Aussi ils se demandent si un adulte qui consomme de l’alcool peut faire des choses interdites. Nous les orientons vers des personnes adaptées pour pouvoir être aidés.

Quel parallèle pouvez-vous faire avec les autres addictions ?

La dépendance à l’alcool est une des plus facile à soigner mais on n’en guéri jamais vraiment.  L’homme doit réapprendre à vivre sans alcool, et la famille doit aussi s’adapter, notamment au niveau de la cuisine. Aucun alcool ne doit être ingéré même dans des plats. On ne doit pas mettre de parfum directement sur le corps. Une rechute c’est fulgurant car le corps est en demande latente. La rechute est une peur pour les anciens alcooliques, il faut rester vigilant, c’est une hygiène de vie. Ceci dit toutes les dépendances se valent car le mal être en est la base et seul le produit différere. L’alcool est le plus facile à trouver car il est légal et très valorisé culturellement et socialement. Parfois la dépendance à l’alcool s’associe à d’autres dépendances, comme la cigarette et le cannabis. La liste est longue avec des médicaments, les réseaux, les achats, les jeux en lignes etc.…

Comment aider une personne que l’on pense dépendante à l’alcool ?

Par amour les gens peuvent vouloir régler le problème et changer. Il faut savoir justement alerter la personne, lui montrer que l’on « sait » mais aussi lui dire qu’elle est capable de s’en sortir et qu’elle mérite la confiance. On conseille aux proches des malades de participer au groupe entourage, qui a lieu 2 fois par mois, et qui est animé par les conjoints. Il faut oser venir vers nous, on peut s’en sortir et retrouver la liberté. Vous pouvez contacter Michel au 06.80.67.04.10 ou Greg au 06.74.89.29.53.

Addiction définition : l‘addiction est une pathologie qui repose sur la consommation répétée d’un produit (tabac, alcool, drogues…) ou la pratique anormalement excessive d’un comportement (jeux, temps sur les réseaux sociaux…) qui conduit à une perte de contrôle du niveau de consommation et une modification de l’équilibre émotionnel.

 

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